Les dernières heures du Welschof

Lundi 24 Juin 1940

« 6h. La nuit a été poignante d’heure en heure, un coup de téléphone relie les 2 ouvrages . Le Welschhoff tient toujours. A 6h30, un guetteur signale le drapeau blanc et un peu plus tard, le drapeau hitlérien flottant sur la casemate de Bining. Un autre avait vu une fumée très épaisse sortir d’une chambre de tir, et bientôt le lieutenant Hacquard rapportait avoir aperçu les occupants sortir du béton. Cependant, à 2h15, le lieutenant Pierre avait demandé un tir de neutralisation par l’intermédiaire de l’observatoire du bloc 1. A 3h, il était en communication avec le lieutenant Huet et à 5h30 avec le capitaine Jouhanet. Et puis…Rien…

 

Il fallait se rendre à l’évidence. Sans un coup de téléphone pour prévenir ses amis, Bining s’était rendu.

 

D’ailleurs, le drapeau hitlérien ne flottait pas longtemps, abattu rapidement par le 47 de la chambre de tir du bloc 1.

 

A 9h, reddition du Welschhoff. L’air était devenu irrespirable, le bloc d’entrée, abandonné, était aux mains de l’infanterie ennemie.

 

L’abri de Rohrbach connait dès 4h30 son bombardement matinal par du 37 anti-char en batterie à 1900m.

 

A 5h30, un 2ème bombardement de même calibre. 2 obus seulement atteignent leur but. Tir de contre-batterie par le Sims. Dans la journée, l’abri subira encore 4 bombardements par 77 et mortiers de 80 dont le dernier à 22h. Notons l’attitude digne d’éloges des sergents-chefs Metz et Marmot. Dès qu’il y a danger, ce sont eux qui montent dans les cloches d’observation pour repérer les batteries allemandes et aider au réglage des tirs amis.

 

A 22h30, c’est l’infanterie ennemie qui attaque. 1 patrouille avec mitraillette. Branle-bas de combat ; le Sims donne son appui, les FM de cloche et de défense d’entrée sont en pleine action. Ce n’est qu’à 0h30, 5 minutes avant l’Armistice, que l’alerte cessera.

 

L’ouvrage de Rohrbach a connu une veillée d’Armistice vraiment active. La matinée, il est vrai, est calme. Mais, dès 12h30, tombent obus et torpilles sur le bloc du lieutenant Huet. Et chacun se dit « serait-ce notre tour ? » Car l’ouvrage de Rohrbach constitue à l’Ouest le dernier ouvrage qui tient encore. Plus de 200 torpilles font vibrer le béton, faisant tomber de larges écailles, labourant le terre-plein. Le capitaine de Saint Ferjeux, décidé plus que jamais à ne pas se rendre, organise la Résistance.

 

Au bloc 2, le plus menacé, sous la direction du lieutenant Huet, chacun s’active : les sacs de terre s’accumulent devant le créneau de la caponnière, des bâtis en poutre renforcent le créneau de porte d’entrée. Le moral est excellent. L’humour ne manque pas. Un guetteur, le soldat Berland, de service dans une cloche sur laquelle vient de s’abattre une torpille, continue à plaisanter : «  ah si j’avais une raquette pour la leur renvoyer ».

 

Dans les dessous, le lieutenant Casso, chef du Génie, organise une défense ingénieuse, qui rappelle la guerre de siège du Moyen-Age.

 

Au bloc 1 et 3, on évacue les obus des chambres de tir, crainte d’une explosion provoquée par des coups de rupture ennemis.

 

Et dans le premier des blocs, contre lequel semble de dessiner une attaque ennemie, on commence le renforcement des créneaux. On n’a plus de sacs de terre ? qu’importe. Tout servira, depuis les sacs de café jusqu’aux caisses de pain de guerre. D’heure en heure, on attend l’attaque. Dans les 1ères heures de la nuit, la vigilance redouble. »

 

                                                        Ltn Huet

 

 

Source :

Journal de marche du lieutenant Huet (mis à disposition de l’association par M. Patrick Perrin, retranscrit par F. Dannenhoffer) –

Témoignages des caporaux-chef Cauchy et Bom, recueillies et publiées par Olivier Koch dans le livre Le Petit Ouvrage de Rohrbach (disponible à la vente à la boutique du Fort Casso, à Rohrbach-lès-Bitche).

 

 

 

 

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